En Guadeloupe, le rhum est bien plus qu’un simple spiritueux : c’est un héritage, une tradition, presque une identité. Sur cette île volcanique bercée par les alizés, la canne à sucre pousse depuis le XVIIᵉ siècle, et chaque goutte de rhum raconte un pan de son histoire coloniale, agricole, puis artisanale.
Aujourd’hui, la Guadeloupe compte une dizaine de distilleries en activité — dont certaines se visitent, d’autres se dégustent, et les meilleures font les deux à la fois ! Distilleries familiales ou groupes industriels, chacune a ses secrets, ses alambics, son vieillissement, ses bouteilles iconiques…
Anecdote locale (transmise par les anciens) : On raconte qu’un ouvrier aurait un jour goûté chaque fût chez Damoiseau pour « vérifier la qualité ». Depuis, l’histoire circule avec humour dans les visites guidées, preuve que, là-bas, le contrôle qualité est pris très à cœur !
La Guadeloupe produit bien du rhum agricole, mais l’AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) ne s’applique aujourd’hui qu’à la Martinique.
Cependant, Marie-Galante bénéficie d'une IGP (Indication Géographique Protégée) pour son rhum agricole à 59°, ce qui en garantit l’origine et les méthodes traditionnelles.
La Guadeloupe n’a pas d’AOC à l’heure actuelle, mais certains producteurs militent pour une reconnaissance officielle.
À noter : l'AOC Rhum Martinique, obtenue en 1996, reste la seule AOC au monde pour un rhum.
Le Ti'Punch : une tradition, pas une recette !
« Chacun fait son Ti’Punch comme il aime. Le Ti’Punch, c’est pas une recette, c’est une cérémonie. »
Préparation :
Écrasez doucement le citron et le sucre au fond d’un verre, ajoutez le rhum. Pas de glaçon, pas de shaker, pas de chichi. Le Ti’Punch se prépare sec et se savoure en parlant. On le tourne doucement avec une cuillère, en trinquant avec le célèbre « Chin-chin ! »
La tradition créole veut que l’on apporte à table les trois éléments de base : une bouteille de rhum (souvent du 50° ou du 59°), du sucre de canne ou du miel, parfois du sirop quelques morceaux de citrons verts coupés.
Et chacun prépare le sien selon son goût, à son rythme. Pas de cocktail pré-mélangé, pas de barman : le Ti’Punch, c’est un moment d’échange, de liberté, de discussion. On le tourne doucement avec une cuillère en bois, parfois avec un brin de canne, pendant qu’on refait le monde ou qu’on parle des récoltes.
🍹 On dit ici : « Chacun son Ti’Punch, chacun son humeur. »
Malheureusement, cette tradition se perd dans certains restaurants "touristiques", où l’on sert le Ti’Punch déjà préparé. Mais dans les tables locales, chez l’habitant ou dans les restos de quartier, ce rituel est toujours bien vivant— et fait partie intégrante de l’expérience culinaire guadeloupéenne.
🌴 Le décollage du matin : une tradition bien ancrée
En Guadeloupe, on appelle « an ti décollaj » (ou dékollaj) le petit verre de rhum que l’on prend de bon matin, parfois à jeun, avant de commencer la journée. Il peut s’agir d’un rhum blanc, souvent adouci avec un peu de sirop, ou d’un rhum arrangé maison.
On dit que ça « décolle le cerveau », « nettoie l’estomac » ou « met en route la machine »… une façon imagée de dire qu’on commence bien la journée.
Si elle tend à se raréfier aujourd’hui pour des raisons de santé évidentes, le décollage fait encore partie du folklore local et de cette culture du rhum profondément ancrée dans la vie guadeloupéenne.
🌞 Conseil : Certaines distilleries proposent des visites guidées, d'autres des dégustations. N’oubliez pas de désigner un capitaine sobre pour la route !
Le rhum en Guadeloupe, c’est un patrimoine vivant. Le visiter, c’est comprendre une île, des hommes, une culture — et goûter au cœur même des Antilles. Alors, que vous soyez simple touriste, amateur passionné ou futur résident, poussez la porte d’une rhumerie.
Vous en ressortirez sûrement… avec le sourire (et quelques bouteilles sous le bras) !